Déclaré admissible, vous commencez à préparer les épreuves orales de votre concours de la fonction publique. Quelles questions peut poser le jury ? Les membres sont là pour vérifier qu’au-delà vos connaissances, vous êtes capable de mettre en évidence les enjeux soulevés dans la question, de prendre position et d’argumenter. Pour compléter vos révisions, voici 3 thèmes d’actualité sur lesquels les membres pourraient vous soumettre en 2025.
1. L’apprentissage et le défi des compétences en France : un sujet d’actualité économique mais pas seulement
Convaincus que la place de la France et de l’Europe dans l’économie mondiale du XXIe siècle se jouera avant tout sur les compétences de la population active, les pouvoirs publics ont entamé ces dernières années, une réflexion sur les nécessaires évolutions du système de formation professionnelle français et notamment de l’apprentissage.
L’apprentissage offre, pour la société, les entreprises et les administrations françaises, des avantages durables et significatifs, pour la promotion et la mixité sociales en milieu professionnel, tout en permettant une meilleure adaptation de l’offre de formation aux besoins en compétences des structures.
Pourtant en 2018, alors que près de 70 % des apprentis sont en emploi sept mois après leur diplôme, l’État constatait que seuls 7% des 15-25 ans passent par l'apprentissage.
Aussi, en septembre de la même année, ce mode de formation a été réformé avec la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel. Pour rendre l’apprentissage plus attractif, l’âge maximum d'entrée en apprentissage a été repoussé à 29 ans, ouvrant largement cette voie de de formation aux étudiants de l’enseignement supérieur. La rémunération a connu une revalorisation accompagnée d’aides financières au permis de conduire B. Une aide unique aux employeurs d'apprentis a été aussi instaurée pour les entreprises de moins de 250 salariés.
Six ans après, incontestablement, le « big bang » de la réforme sur l’apprentissage a changé la donne en matière de compétences : L’économie française dispose désormais d’un système de formation en alternance moderne et réactif qui constitue un atout puissant dans la compétition internationale.
849 600 contrats d’apprentissage ont commencé en 2023 dans les secteurs privé et public (+2 % par rapport à 2022). 1 014 500 contrats d’apprentissage sont en cours au 31 décembre 2023 (+4 % en un an - source : Dares). Bien que le secteur public ait connu une forte progression des entrées en apprentissage en 2021 (+41%), il reste à la traine : 25 020 nouveaux contrats ont été signés en 2023. Une hausse principalement portée par la fonction publique d'État (près de 2000 contrats de plus qu'en 2022), puis par la fonction publique hospitalière (630 contrats supplémentaires – source : ministère de la transformation et de la fonction publiques).
97% des nouveaux contrats sont signés dans le secteur privé. Cette hausse des entrées en apprentissage est principalement soutenue par les employeurs du secteur tertiaire (+16% par rapport à 2021), mais elle est moins prononcée dans l'industrie (+5%), la construction (+6%), et l'agriculture (+7%).
Une efficacité qu’il faut mettre en relation avec le coût de cette réforme : 13,5 milliards d’euros en 2022.
Aujourd’hui, il est nécessaire d’aller encore plus loin : les structures publiques ou privées et leurs agents/salariés sont confrontés à des évolutions technologiques et des transformations de leur environnement totalement inédites, de par leur ampleur et leur rapidité. La révolution numérique est accélérée par l’émergence de l’intelligence artificielle (IA) qui bouleverse fondamentalement les métiers en redistribuant la carte des compétences et de la valeur. La transition énergétique introduit un nouveau challenge pour les acteurs économiques : investir et innover pour produire différemment.
Ce contexte nécessite d’approfondir la réforme du système de formation français, afin de le rendre encore plus efficace, plus simple, plus inclusif, plus stable et financièrement soutenable.
Ce thème pourrait amener les membres à questionner les futurs fonctionnaires sur l’objectif officiel d’atteindre un million d’entrées en apprentissage par an. Aujourd’hui à l’heure de la rationalisation du financement des centres de formation d’apprentis, (moins 50 millions d’euros pour l’enveloppe de fonctionnement dédiée par les régions aux CFA), ce dernier reste-t-il pertinent ?
Mais le jury pourra aussi questionner les candidats sur… : « Comment repérer les publics fragilisés et les accompagner au mieux vers des parcours qualifiants de formation ? Développer l’employabilité des publics fragilisés ? Comment le gouvernement aide-t-il les jeunes chômeurs en France ? »…Ici, le plus important n’est pas de citer une série de d’outils ou de chiffres mais d’offrir au jury une réponse structurée qui lui permettra de vérifier que vous avez compris les enjeux, de détailler - si cela est utile - quelques dispositifs en place (ex. Aide Mobili-Jeune pour aider les alternants à payer leur loyer) et leurs résultats.
2. La loi « handicap », 20 ans après : un sujet social inéluctable en 2025
La loi pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, dite « loi handicap » adoptée le 11 février 2005 a constitué une avancée législative très importante pour l’inclusion des 13 millions de personnes en situation de handicap.
La loi définit (pour la première fois) le handicap de la façon suivante : « constitue un handicap toute limitation d’activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d’une altération substantielle, durable ou définitive d’une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant ».
La loi de 2005 renonce à une approche strictement médicale du handicap. Son objectif est d’abord de faciliter le maintien en milieu ordinaire. Avec toutes ses imperfections pour certains et ses grandes avancées pour d’autres, les acteurs publics et notamment, les élus locaux se sont fortement mobilisés.
20 ans après, les questions sur les avancées de la loi et les freins qui subsistent sont plus que jamais d’actualité.
Avec la loi handicap de 2005 des maisons départementales pour les personnes handicapées (MDPH) ont été mises en place. Il s’agit d’un guichet unique ayant pour but de simplifier les démarches administratives, en rassemblant au sein d’une structure les acteurs qui prennent en charge les handicaps. Un « droit à compensation » pour la personne handicapée a aussi été créé, via la prestation de compensation du handicap (PCH). Cette compensation payée par les Conseils départementaux inclut des aides humaines, techniques, et des aménagements de logements. « L’Etat » doit prendre en charge les surcoûts générés par le handicap.
Une autre des mesures phares de la loi de 2005 est : l’obligation d’accessibilité pour les établissements recevant du public (ERP), mais aussi pour les transports, les logements, les écoles… L’accessibilité, c’est permettre aux personnes en situation de handicap, « sur la base de l’égalité avec les autres à l’accès à tous les aspects de la société, y compris à l’environnement physique, aux transports, aux services d’informations, de communication et aux autres équipements et services ouverts ou fournis au public » (Convention relative aux droits des personnes handicapées, 2006). Un chantier titanesque.
L’inclusion scolaire est aussi un chapitre majeur. Depuis l’entrée en vigueur de la loi, tout enfant porteur d’un handicap a le droit de s’inscrire dans un établissement référent de secteur, une école « ordinaire », pour favoriser l’intégration des enfants, dès le plus jeune âge. La loi reconnaît la responsabilité de l’État d’accompagner les enfants ayant des besoins spécifiques. Des Auxiliaires de vie scolaire (AVS), devenus depuis les accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) dans le cadre de l’AHEH (Aide Humaine aux Élèves Handicapés), ont été mis en place, permettant un soutien personnalisé pour les élèves.
Malgré des progrès en termes d’inclusion, le bilan reste mitigé. S’agissant par exemple, de l’inclusion scolaire, si le nombre d’élèves en situation de handicap scolarisés en milieu scolaire « ordinaire » a largement augmenté, passant de 100 000 en 2006 à 436 000 en 2022, un rapport du Sénat datant de mai 2023 met en exergue le manque de réponses face aux attentes des familles et des enfants. Les AESH ne répondent pas assez bien aux besoins des élèves en situation de handicap (ex. manque de formations des AESH, précarité de leurs contrats de travail, manque d’intégration à la communauté éducative,..).
Dans le domaine de l’insertion professionnelle, les collectivités ont rempli les objectifs fixés par la loi et peuvent même s’enorgueillir du meilleur taux d’emploi au sein des trois versants de la fonction publique. Mais en 2025, l’expérience quotidienne des personnes en situation de handicap reste insatisfaisante : fréquence des ruptures dans les cheminements, logements accessibles et adaptés mal identifiés à l’échelle locale, sites internet institutionnels souvent inaccessibles, ERP trop nombreux à ignorer leurs obligations de mise en accessibilité,...
Sur le plan national, au vu de la difficulté à respecter les échéances, le Conseil des ministres a approuvé, en 2014, un Agenda d’accessibilité programmé (Ad’ap), qui consiste en un nouveau dispositif d’échéancier, avec des délais supplémentaires importants pour la réalisation des travaux de mise aux normes. Cet agenda accordait jusqu’à 9 ans de délais supplémentaires pour les gestionnaires d’au moins 50 établissements recevant du public (ERP) et pour les monuments historiques. Pourtant, en avril 2023, le Comité européen des droits sociaux (CEDS), chargé de s’assurer du respect de la Charte sociale européenne a condamné l’État français pour « violation des droits des personnes handicapées ». Le CEDS a précisé que les autorités françaises « n’ont pas adopté de mesures efficaces en ce qui concerne l’accessibilité des bâtiments, des installations, des logements et transports publics ».
En août 2024, à la veille des Jeux paralympiques, l’ancienne ministre déléguée aux personnes handicapées, Fadila Khattabi avait donné des chiffres assez inquiétants : sur près de deux millions d’ERP, seulement 900 000 seraient conformes en termes d’accessibilité.
Autant de sujets qui peuvent conduire les membres du jury à questionner les candidats sur le thème du handicap et les difficultés à appliquer les principes de la loi handicap pour respecter les droits des personnes handicapées ou encore, poser la question de savoir : « Quels sont les leviers et les opportunités pour soutenir la mise en accessibilité des ERP des structures « les plus fragiles financièrement » et des petits commerces, restaurants, par exemple ? Quelles pistes pour améliorer la qualité et l'efficacité des MDPH ? »
Allocation adulte handicapé (AAH), reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH), « 50.000 nouvelles solutions médico-sociales », il ne s’agit pas de devenir un expert de l’action et de l’aide sociale dédiée aux personnes en situation de handicap, mais de vous habituer à lire des articles sur le thème, d’acquérir du vocabulaire, pour comprendre les enjeux et le déploiement lié.
3. Cybersécurité et défense des usagers : un thème à maitriser
Entre la course à la dématérialisation autant pour répondre à des obligations réglementaires qu’à un souci de rendre un meilleur service aux citoyens, et les cyberattaques, les administrations doivent s'armer numériquement, protéger leur système d’information, sensibiliser et former les agents mais aussi protéger la confiance qu'ils construisent avec les usagers, notamment en protégeant leurs données personnelles.
C’est l’ensemble de ces moyens que l’on désigne par le terme de « cybersécurité ».
La dépendance de plus en plus forte aux systèmes d’information (SI), couplée à l’hétérogénéité de la taille des administrations et des collectivités locales crée une fragilité. Le secteur public est depuis quelques années une cible pour les hackers et les cyberattaques. Par exemple, 30% des collectivités territoriales ont déjà été victimes d’un « rançongiciel » (c’est-à-dire d’envoi d’un logiciel malveillant qui chiffre l’ensemble des données de la victime et lui demande une rançon en échange du mot de passe de déchiffrement - cf. « Panorama de la cybermenace en France », Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi), édition 2022).
La France fait de la cybersécurité sa priorité depuis les années 2000. L'Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) a été créée en 2009 pour défendre et protéger les systèmes d’information et les usagers du numérique contre les cyberattaques. Le retour de la menace terroriste en 2015 a poussé le gouvernement à intensifier ses efforts en la matière (création en 2017 du groupement d’intérêt public d’assistance aux victimes de cybermalveillance : Cybermalveillance.gouv.fr pour les entreprises, les particuliers, les entreprises, les associations, les collectivités et les administrations).
L'application en France en 2024 de la nouvelle directive européenne « Network and information system security » (NIS 2) a aussi pour objectif d’augmenter le niveau de cybersécurité, cela étant, dans un contexte de guerre en Ukraine, la menace reste élevée, les attaques informatiques concernant plus particulièrement les entités moins protégées.
Une cybermenace correspond au risque d’attaque de systèmes informatiques privés ou publics. La menace peut aussi bien être intérieure qu’extérieure, et provient de hackers (personnes spécialisées dans la manipulation – hack – d’un système informatisé, capables d’exploiter ses failles de sécurité). Agissant individuellement ou en groupes plus ou moins structurés (mouvement « hacktiviste »), elles peuvent être guidées par des motivations personnelles, matérielles ou idéologiques (par exemple, les Anonymous). Certains de ces groupes, liés à la criminalité organisée, cherchent à retirer un bénéfice financier de leurs actions (rançonnage).
La cybermenace peut, à l’extrême, concerner la destruction potentielle de postes de travail et de systèmes informatiques. Le risque lié à ce type d’attaques tient à la propagation exponentielle de leurs effets délétères en cas d’inaction, ou simplement de défaut de veille appropriée en matière de sécurité informatique. La très grande difficulté d’identification de l’origine exacte de la cybermenace contribue à la difficulté de son traitement. Le risque qui paraissait ne concerner que des entreprises est aujourd'hui une réalité pour les administrations et établissements publics.
Si les administrations françaises s'emparent du sujet, il y a un écart sur le terrain.
Dans la territoriale par exemple, les grandes métropoles sont désormais équipées de matériel informatique et de systèmes de cybersécurité (« Les collectivités territoriales face au défi de la cybersécurité », rapport Sénat, 2021). Mais bien souvent, les postes de responsable de la sécurité des systèmes d'information (RSSI) ouverts n'attirent pas suffisamment de candidats. Les collectivités territoriales éprouvent des difficultés à recruter, étant donné qu’elles ne proposent pas le même niveau de salaire que celui des grandes entreprises. Les efforts doivent donc être poursuivis.
Il s’agit également de maintenir voire renforcer la confiance des usagers dans les services publics dématérialisés. Pour cela, les autorités administratives ont l’obligation de respecter :
- le référentiel général de sécurité (RGS). Ce texte règlementaire s’inscrit dans la politique publique de dématérialisation des démarches administratives et de confiance en l’économie numérique instauré par l’État. Il définit les exigences de sécurité (analyse de risque, homologation, etc.) pour tous les systèmes d’information (« téléservices ») mis à disposition des usagers et autorités administratives en vue de réaliser diverses démarches ou formalités administratives. Le RGS définit également un processus de qualification des prestataires de services de confiance (délivrance de certificats électroniques, service d’horodatage électronique, etc.) sur lesquels les administrations peuvent s’appuyer dans la mise en œuvre de leurs téléservices ;
- le règlement général sur la protection des données (RGPD) entré en vigueur le 25 mai 2018. Le RGPD est un texte européen qui s’applique aux autorités administratives en tant que responsables de traitements de données à caractère personnel. Il comprend les principales règles à mettre en œuvre en matière de protection des données personnelles et pose des exigences en matière de sécurité : nomination d’un Data Protection Officer (DPO) ; inventaire des traitements de données à caractère personnel mis en œuvre par l’organisation,…
Mais au-delà du respect du cadre réglementaire, certaines vont déjà plus loin, et entreprennent des initiatives en s’assurant de la sensibilisation, la formation des parties prenantes à la confiance numérique et à la cybersécurité, de manière très simple et adaptée, impulsent à la mise en place d’une « administration numérique » de confiance, à travers plusieurs axes tels que : mener des nouveaux projets numériques fiables et pérennes ; maîtriser le numérique au quotidien ; être prêt au pire et savoir réagir...
Un thème riche qui peut susciter du jury les questions suivantes : « Quels outils utiliser pour se protéger des cyberattaques ? Comment s’y prendre en cas d’incident ? Comment protéger les données personnelles des usagers, et des agents ? Comment gagner la confiance des utilisateurs des services publics dématérialisés ? Où trouver des soutiens financiers ? »
D’autres notions, sont aussi à réviser, comme la sobriété numérique (démarche dont le but est de minimiser l'impact environnemental du numérique en réduisant la consommation d'énergie des objets technologiques et connectés). Sur toutes ces questions, veillez à apporter une réponse contenant des éléments précis (ex. rappel des dispositions applicables en matière de protection des données, définition des notions de cyberattaque, cybersécurité,…).
Pour renforcer votre savoir : pensez à compléter vos révisions par des travaux corrigés
Dernier conseil : gardez à l’esprit que ces questions ne sont pas posées « juste » pour vérifier si vous avez une connaissance pointue dans un domaine d’actualité mais plutôt votre ouverture d’esprit et sur le monde, votre gout pour la « chose publique ».
Elles vont aussi permettre aux membres du jury de savoir si vous savez rester neutre, prendre du recul. Il ne s’agit pas de faire des réponses « plates » mais d’avoir une analyse, un propos, plus ou moins long ou développé en fonction de la question posée et d’être capable de sélectionner un ou deux exemples qui illustrent la question et votre argumentation.
Les membres de jurys de concours, surtout à l’oral, sont souvent des férus de politiques publiques. Une préparation, des travaux dirigés ou encore une formation intensive, par exemple, vous offrira l’opportunité d’acquérir non seulement une méthode de révision efficace mais également des supports de connaissances à jour. Sous forme d’entraînements, de quizz, de fiches thématiques, notamment, ces préparations spécifiques proposent un suivi rapproché. En bonus, elles vous permettront de demander des conseils en direct aux intervenants.
Pour conclure, vous vous en doutez, cela serait trop facile de ne réviser que ces 3 thèmes. Donc continuez à suivre l’actualité, faites-vous des fiches thématiques et bien sûr, tenez-vous informé, lisez la presse spécialisée et nationale.
Bonnes révisions avec Carrières Publiques !