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Le contrat de responsabilité parentale, absentéisme scolaire et obligations du président du conseil général

février 2011

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Depuis 2006 , pour répondre au problème d'absentéisme scolaire et plus généralement pour accompagner les parents d'élève en difficulté, un Contrat de responsabilité parentale (CRP) rappelant leurs obligations et comportant des mesures d'aide ou d'action sociales peut, dans certains cas, être signé entre le président du conseil général, chef de file de l'aide sociale à l'enfance et les parents (ou le tuteur légal de l'enfant). En cas de non-respect de ce contrat, les familles peuvent être soumises à une suspension des allocations familiales. Quels sont les situations visées par le CRP, le régime des sanctions prévues et l'accompagnement qui peut être proposé aux parents par le département ?  

Phrases clés :

À partir de quatre demi-journées d'absence dans le mois, on parle d'absentéisme scolaire. Dispositif créé en 2006, rares sont les départements à avoir mis en oeuvre le CRP, l'approche coercitive du dispositif ayant fait polémique. Avec la loi du 28 septembre 2010 visant à lutter contre l'absentéisme scolaire, le CRP évolue : initiative parentale possible, mesures de suspension des allocations familiales en cas d'absentéisme du ressort de l'inspecteur d'académie...  

Quelles sont les situations visées par le contrat de responsabilité parentale ?

Si l'obligation scolaire, dont la garantie incombe au maire, impose aux personnes ayant la responsabilité d'enfants âgés de 6 à 16 ans de les inscrire dans un établissement scolaire ou de déclarer leur faire donner une instruction dans la famille, l'obligation d'assiduité s'impose aux enfants inscrits dans un établissement scolaire quel que soit leur âge. En effet, l'article L.511-1 du Code de l'éducation dispose que « Les obligations des élèves consistent dans l'accomplissement des tâches inhérentes à leurs études ; elles incluent l'assiduité et le respect des règles de fonctionnement et de la vie collective des établissements. »[1] Historiquement considéré comme un phénomène marginal en France, l'absentéisme s'est pourtant beaucoup développé depuis une dizaine d'années, et ce dans toutes les couches de la société. Il touche environ 5 % des élèves (selon le ministère de l'Éducation). Depuis quelques années, une batterie de mesures a été expérimentée. Parmi elles :

  • dès 2002, un système d'amende est imaginé pour davantage responsabiliser les parents. L'avant-projet de loi sur la sécurité intérieure prévoyait de considérer l'absentéisme comme un délit, pouvant coûter 2 000 euros aux parents « fautifs ». Cette méthode musclée est finalement abandonnée en 2003 au profit d'une sanction allégée : une amende de 750 euros[2] ;
  • en 2004, la lutte contre l'absentéisme scolaire est érigée au rang de priorité absolue. Une circulaire ministérielle détermine la procédure à suivre par les personnels de l'Éducation nationale, en cas d'absentéisme[3] ;
  • en octobre 2009, l'académie de Créteil a même annoncé la mise en place d'une cagnotte collective, dans les classes de trois lycées professionnels (cette incitation financière « contre l'école buissonnière » s'est faite à titre expérimental et n'a pas été développée dans d'autres académies).

En 2006, la loi n° 2006-396 sur l'égalité des chances du 31 mars 2006 institue un CRP entre les parents ou tuteurs légaux des enfants et le département. Détenteurs de l'autorité parentale, et responsables civilement des actes de leurs enfants, les familles se voient par ce contrat directement impliquées dans la lutte contre l'absentéisme scolaire et, d'une manière plus générale, dans les actions de prévoyance de la délinquance des mineurs.  

Concrètement, un CRP peut être proposé aux parents, en cas :

  • d'absentéisme scolaire ;
  • de trouble porté au fonctionnement d'un établissement scolaire ;
  • de difficulté liée à une carence de l'autorité parentale.  

À l'origine du dispositif, cette proposition pouvait (seulement) émaner du président du conseil général, sur sa propre initiative ou sur « saisine » (signalement) :

  • de l'inspecteur d'académie ;
  • du chef d'établissement scolaire de l'enfant ;
  • du maire ;
  • du directeur de l'organisme débiteur des prestations familiales (Caisse d'allocations familiales ou Mutualité sociale agricole) ;
  • ou du préfet.  

Depuis 2010[4], un CRP peut également être signé à « l'initiative » des parents (ou du représentant légal de l'enfant). 

Quel est le contenu du CRP ?

Contrat moral, le CRP a pour objectif d'aider les parents qui rencontrent de grandes difficultés pour éduquer leur(s) enfant(s). Le contrat est transmis aux parents qui disposent de quinze jours pour donner leur accord et signer ou, en cas de refus, pour faire part de leurs remarques ou de leurs propositions pour mettre fin au comportement de leur(s) enfant(s).F D'une durée initiale qui ne peut excéder six mois, le contrat peut être renouvelé sans excéder une année.  

Ce dernier indique :

  • la situation de l'enfant et de ses parents (ou de son représentant légal) ;
  • les motifs précis qui justifient sa mise en place ;
  • les obligations qui incombent à tous les parents ;
  • les engagements des parents pour pallier les carences parentales constatées ;
  • la nature de l'assistance et les mesures d'aide et d'action sociales relevant du président du conseil général de nature à contribuer à résoudre ces difficultés (cf. infra) ;
  • les modalités du réexamen de la situation de l'enfant et des parents durant la mise en oeuvre du contrat ;
  • le rappel des sanctions en cas de non-respect du contrat ou lorsque, « sans motif légitime », le contrat n'a pu être signé par les parents.  

En effet, afin de responsabiliser les parents, la loi donne au dispositif un caractère coercitif : les parents s'exposent à des sanctions financières s'ils refusent de signer ou s'ils ne respectent pas leurs engagements.  

Quel est le régime des « sanctions » ?

Plus précisément, la loi prévoit que lorsque les parents refusent de signer le CRP qui leur est proposé ou n'honorent pas les engagements qu'ils ont souscrits dans ce cadre, le président du conseil général peut :

  • saisir le procureur de faits susceptibles de constituer une infraction pénale ;
  • saisir le juge des enfants qui peut ordonner que les prestations familiales soient, en tout ou partie, versées à un tuteur ;
  • demander au directeur de la CAF la suspension du versement de la part des allocations familiales relatives à l'enfant ou aux enfants concernés pour une durée renouvelable de trois mois et de douze mois au maximum, sauf, depuis 2010, si le CRP est proposé ou conclu en cas d'absentéisme scolaire.  

En effet, depuis la loi du 28 septembre 2010, pour lutter contre ce problème particulier, le législateur prévoit qu'à partir de quatre demi-journées d'absence dans le mois « constatées et non justifiées » et après avertissement des personnes responsables de l'enfant (adressé par courrier ou à l'occasion d'un entretien avec lui ou son représentant), le directeur d'établissement doit prévenir l'inspecteur académique qui convoquera les parents afin de mettre en place un CRP. Si le mois suivant il y a encore de l'absentéisme constaté, alors l'inspecteur (auparavant cette décision appartenait au président du conseil général) est dans l'obligation d'en avertir le directeur de la CAF qui suspendra voire supprimera la part des allocations familiales relatives à l'enfant ou aux enfants concernés selon les modalités de calcul fixées par le récent décret du 21 janvier 2011[5].  

Les parents qui s'acquittent finalement de leurs obligations éducatives récupèrent rétroactivement leurs droits. Ceux qui persistent dans leur carence et leur « démission » morale recouvrent de toute façon leurs droits au bout de douze mois mais sans rattrapage.  

Quel accompagnement départemental pour les parents en difficulté ?

L'article L.222-4-1 du Code de l'action sociale et des familles créé en 2006 dispose que le président du conseil général est tenu d'agir lorsqu'il se saisit, ou est saisi en cas d'absentéisme scolaire, de trouble porté au fonctionnement d'un établissement scolaire ou de difficulté liée à une carence de l'autorité parentale.  

Avant 2006, de nombreux dispositifs départementaux ayant pour objectif d'apporter un soutien à la fonction parentale existaient déjà. Parmi elles, les « actions éducatives à domicile » organisées par les services de l'aide sociale à l'enfance des départements avec l'intervention de travailleurs sociaux au sein de la famille. Cependant selon le gouvernement, ces aides ne permettaient pas d'apporter une « solution équilibrée au problème de « démission » des parents » puisqu'elles reposent sur une démarche volontaire des familles sans injonction possible « même si les carences éducatives sont patentes ».  

La loi du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances a donc créé le CRP. Cependant, les présidents des conseils généraux y voyant là un enchevêtrement des textes, et face à de grandes « incertitudes juridiques », ont préféré se contenter du statu quo.  

Pour apporter plus de sécurité juridique, l'action que le président du conseil général est tenu d'entreprendre peut désormais[6] prendre la forme d'un CRP dont le suivi de la mise en oeuvre est assuré par un travailleur social (il s'assure du respect des dispositions adoptées, comme la bonne assiduité scolaire de l'enfant par exemple), mais le président du conseil général peut décider d'agir en mettant en place d'autres mesures d'accompagnement : aide financière, soutien scolaire, etc.  

Ces changements législatifs suffiront-ils à rendre le dispositif efficace dans les années à venir ? En tout cas, ils ont le mérite d'exister. Toutefois, force est de constater que sur le terrain, entre le délai nécessaire pour constater des absences, la remontée d'informations, la vérification, la décision de passer au contrat, la signature du CRP par les parents, le constat de son application ou non, ou encore la procédure contradictoire nécessaire avant que la sanction ne soit infligée, le renvoi à la CAF pour suspension et sa décision de suspendre les allocations, l'absentéisme scolaire, coeur du problème (touchant 300 000 enfants en France) est loin d'être réglé.   Définition de l'absentéisme scolaire au sens de l'article L.131-8 du Code de l'éducation « Lorsqu'un enfant manque momentanément la classe, les personnes responsables doivent, sans délai, faire connaître au directeur ou à la directrice de l'établissement d'enseignement les motifs de cette absence. Les seuls motifs réputés légitimes sont les suivants : maladie de l'enfant, maladie transmissible ou contagieuse d'un membre de la famille, réunion solennelle de famille, empêchement résultant de la difficulté accidentelle des communications, absence temporaire des personnes responsables lorsque les enfants les suivent. Les autres motifs sont appréciés par l'inspecteur d'académie. Celui-ci peut consulter les assistantes sociales agréées par lui, et les charger de conduire une enquête, en ce qui concerne les enfants en cause ».    

     Sandrine BOTTEAU  

[1] Idem.

[2] www.viepublique.fr ; décret n° 2004-162 du 19 février 2004 relatif au contrôle de la fréquentation et de l'assiduité scolaires abrogé.

[3] Circulaire n° 2004-054 du 23 mars 2004 relative au contrôle et à la promotion de l'assiduité des élèves soumis à l'obligation scolaire.

[4] Loi n° 2010-1127 du 28 septembre 2010 visant à lutter contre l'absentéisme scolaire.

[5] Décret n° 2011-89 du 21 janvier 2011 relatif aux modalités de calcul de la part des allocations familiales suspendues ou supprimées en cas d'absentéisme scolaire.

[6] Loi n° 2010-1127 du 28 septembre 2010 visant à lutter contre l'absentéisme scolaire

Références Loi n° 2006-396 sur l'égalité des chances du 31 mars 2006. Loi n° 2010-1127 du 28 septembre 2010 visant à lutter contre l'absentéisme scolaire (JO n° 226 du 29 septembre 2010). Décret n° 2011-89 du 21 janvier 2011 relatif aux modalités de calcul de la part des allocations familiales suspendues ou supprimées en cas d'absentéisme scolaire. Articles L.222-4-1 et R.222-4-1 à R.222-4-5 du Code de l'action sociale et des familles. Article L.131-8 du Code de l'éducation. Articles L.552-3-1 et R.552-4 du Code de la Sécurité sociale.

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