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Recrutement des personnes handicapées dans la Fonction publique, mode d'emploi

février 2010

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Le principe d'égalité entre les fonctionnaires veut qu'aucun candidat handicapé, reconnu apte à travailler en milieu ordinaire, ne puisse être écarté, en raison de son handicap, d'un concours ou d'un emploi sauf si ce dernier a été déclaré médicalement incompatible avec la fonction postulée.

Afin de favoriser leur insertion professionnelle, depuis le 1er janvier 2010, les employeurs publics de plus de 20 agents (Etat, hôpitaux et collectivités : mairies, départements, régions...) seront redevables financièrement dès lors qu'ils n'emploieront pas 6 % de travailleurs handicapés. Au-delà de cette obligation d'emploi prévue par le législateur depuis 2005[1], quels sont les dérogations et aménagements en la matière ?  

Des mesures dérogatoires d'accès à la fonction publique au nom du principe d'égalité

Le droit de la fonction publique se caractérise par le principe d'égalité. Celui-ci s'articule autour de deux branches : l'égal accès aux emplois publics et l'égalité de traitement dans le déroulement de la carrière des fonctionnaires.  

Le principe d'égal accès aux emplois publics est inscrit à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et des citoyens (DDHC) : « tous les Citoyens (...) sont également admissibles (aux...) emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents ».  

Concernant le principe d'égalité de traitement entre les fonctionnaires, le statut, afin d'en garantir son respect à l'égard des travailleurs handicapés, impose aux employeurs publics de prendre les mesures appropriées pour permettre à certaines catégories de personnes handicapées « d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l'exercer et d'y progresser ou pour qu'une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée, sous réserve que les charges consécutives à la mise en oeuvre de ces mesures ne soient pas disproportionnées » (article 6 sexies de la loi du 13 juillet 1983 - cf. infra).  

Afin de favoriser l'insertion professionnelle des personnes handicapées, ces deux principes ont été assortis de dérogations et d'aménagements par différentes lois dont la dernière, en date la loi du 11 février 2005. Parmi les mesures les plus importantes on peut citer :

  • d'une part, « l'obligation d'emploi de 6 % ». Il s'agit d'une obligation à laquelle est soumis tout employeur public, excepté les établissements publics industriels et commerciaux, occupant au moins vingt salariés de recruter au moins 6 % de personnes handicapées. À défaut de remplir cette obligation, depuis cette année, les collectivités doivent financièrement contribuer à plein régime au FIPHFP[2] ;
  • d'autre part, les aménagements et dérogations relatives à l'accès aux emplois publics (cf. infra).  

Enfin, la loi pose clairement le principe de non-discrimination (conséquence directe du principe d'égal accès à la FP) pour qui « aucun candidat ayant fait l'objet d'une orientation en milieu ordinaire de travail par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH)[3] ne peut être écarté, en raison de son handicap, d'un concours ou d'un emploi de la fonction publique, sauf si son handicap a été déclaré incompatible avec la fonction postulée à la suite de l'examen médical destiné à évaluer son aptitude à l'exercice de sa fonction ».  

Des conditions d'accès dérogatoires générales et particulières aux emplois publics strictement définies

Le principe d'égalité veut qu'outre la satisfaction des conditions liées à l'emploi[4], l'accès des personnes handicapées à la fonction publique suppose le respect des conditions générales énoncées à l'article 5 du statut général des fonctionnaires.  

En vertu de cet article « nul ne peut avoir la qualité de fonctionnaire :

  1. s'il ne possède la nationalité française (avec des dérogations possibles pour les ressortissants de l'Union européenne),
  2. s'il ne jouit de ses droits civiques,
  3. le cas échéant, si les mentions portées au bulletin n° 2 de son casier judiciaire sont incompatibles avec l'exercice des fonctions, 
  4. s'il ne se trouve en position régulière au regard du code du service national,
  5. s'il ne remplit les conditions d'aptitude physique exigées pour l'exercice de la fonction compte tenu des possibilités de compensation du handicap ».  

Pour avoir la qualité de fonctionnaire, les candidats doivent donc notamment remplir celles relatives aux conditions d'aptitudes physiques. Ces dernières sont vérifiées, par le médecin agréé, à l'occasion d'une visite médicale préalable à l'embauche, et sont appréciées en fonction des possibilités d'aménagements raisonnables s'offrant à l'employeur.

Des conditions particulières de recrutement peuvent s'ajouter aux conditions générales. Elles sont relatives à l'âge, aux diplômes ou titres ou niveau d'études (expérience professionnelle reconnue...).

S'il est impossible de déroger à l'âge minimum de recrutement des fonctionnaires fixé à seize ans, il en est autrement pour la limite d'âge maximale fixée par chaque statut particulier. Pour les handicapés, la loi statutaire prévoit que les limites d'âge supérieures fixées pour l'accès aux emplois (qui constituent du reste l'exception aujourd'hui) ne sont pas opposables au :

  • titulaire d'une attestation de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH);
  • titulaire d'une carte d'invalidité; allocataire de l'aide aux adultes handicapés (AAH);
  • victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle et titulaire d'une rente;
  • titulaire d'une pension d'invalidité si la capacité de travail ou de gain est réduite d'au moins deux tiers;
  • ancien militaire et assimilé titulaire d'une pension militaire d'invalidité;
  • sapeur-pompier volontaire blessé dans l'exercice de ses fonctions.  

Enfin, les personnes qui ne relèvent plus de l'une des catégories citées ci-dessus peuvent quand même bénéficier d'un recul des limites d'âge supérieures pour se présenter aux concours. Celui-ci est « égal à la durée des traitements et soins (que les personnes) ont eu à subir lorsqu'elles relevaient de l'une de ces catégories ». Ce recul est limité à 5 ans (article 35 du statut).  

Une fois ces conditions réunies, les personnes handicapées peuvent bénéficier de deux voies d'accès à la fonction publique : soit celle du recrutement par concours (droit commun), soit celle du recrutement par contrat (voie dérogatoire).  

La voie d'accès de droit commun : le recrutement sur concours avec aménagement possible des épreuves

Le droit commun est posé à l'article 16 du statut général des fonctionnaires : « les fonctionnaires sont recrutés par concours (externe, interne ou troisième concours) sauf dérogation prévue par la loi ». Ce principe vaut aussi pour les personnes handicapées. Toutefois, afin de garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard des travailleurs handicapés, le statut prévoit, à titre dérogatoire, que les candidats handicapés bénéficient, de droit, d'aménagements d'épreuves en fonction de la nature de leur handicap. Pour pouvoir en bénéficier, les candidats handicapés doivent en faire la demande lors de l'inscription au concours en attestant de la qualité de personne handicapée et en précisant les aménagements souhaités.  

Parmi les dérogations aux règles normales de déroulement des concours et des examens, on peut mentionner les possibilités :

  • d'apporter les aides humaines et techniques nécessaires ;
  • d'adapter la durée et le fractionnement des épreuves aux moyens physiques des candidats ;
  • d'accorder des temps de repos suffisants notamment entre deux épreuves successives, de manière à leur permettre de composer dans des conditions compatibles avec leurs moyens physiques.  

Pour répondre au mieux aux demandes des candidats, les services organisateurs de concours des diverses administrations s'attachent à faire remonter les demandes de plus en plus diverses (lits de repos, ordinateurs, secrétaires assistants, orthophonistes...) et n'hésitent pas à se montrer innovants (par exemple l'ESEN[5] de Lille dispose de sujets pour les concours d'enseignants en braille ou agrandis) permettant à un nombre plus important de candidats de présenter les épreuves.  

La voie d'accès dérogatoire : le recrutement sur contrat en vue d'une titularisation

Pour lever les freins à l'embauche, par dérogation au principe selon lequel la qualité de fonctionnaire s'acquiert suite à la réussite d'un concours, les personnes handicapées peuvent être recrutées et devenir fonctionnaires (titulaires) sur contrat, et ce, sur des emplois publics de catégorie A (niveau BAC +), B (niveau BAC) et C (sans conditions de diplôme) (article 38 alinéa 7 du statut).  

Cette voie d'accès dérogatoire à la titularisation est ouverte aux personnes (cf. supra s'agissant des bénéficiaires de la dérogation à la limite d'âge) possédant une attestation de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH), une carte d'invalidité, bénéficiaires de l'AAH... En revanche, s'agissant d'une mesure créée dans le but de permettre à des personnes handicapées non encore fonctionnaires de le devenir, la loi du 11 février 2005 exclut du champ d'application de ce mode de recrutement les personnes qui ont la qualité de fonctionnaire (article 33).  

Les bénéficiaires du recrutement sur contrat doivent, comme pour les candidats au concours, satisfaire aux conditions générales de recrutement mais une dérogation à la condition de diplôme et de niveau d'études est prévue. Cette dérogation diffère selon les catégories des emplois à pourvoir :

  • pour ceux de catégories A et B :

Les candidatures sont déposées auprès d'une commission chargée de vérifier les équivalences de diplômes.

  • pour ceux de catégorie C :

L'administration est compétente pour apprécier le niveau de connaissance et de compétence requis des candidats. Elle peut si cela s'avère nécessaire compléter l'examen du dossier de candidature par des entretiens.  

Du contrat à la titularisation : les étapes

Les intéressés sont recrutés en qualité « d'agents non titulaires » (statut « hybride » qui regroupe des dispositions propres à la fois aux agents non titulaires et aux stagiaires). La durée du contrat est équivalente à la période de stage effectuée, pour le même emploi, par un lauréat de concours (le plus souvent un an).  

Côté rémunération, celle-ci équivaut à celle dont bénéficient les fonctionnaires stagiaires issus des concours externes et évolue dans les mêmes conditions. De plus, ils peuvent percevoir des primes et des indemnités (indemnité de résidence, supplément familial de traitement...). Ils bénéficient également d'une formation au cours de leur contrat et font l'objet d'un suivi personnalisé.  

Et après ? Le déroulement du contrat fait l'objet d'un rapport d'appréciation établi par le supérieur hiérarchique et, éventuellement, par le directeur de l'organisme ou de l'établissement de formation. Le stagiaire passe un entretien à caractère professionnel permettant d'apprécier les missions et les tâches effectuées, et à l'issue de la période de contrat :

  • si l'agent a fait preuve des aptitudes professionnelles requises à l'exercice de ses fonctions, il est titularisé ;
  • si, sans s'être révélé inapte à exercer ses fonctions, il n'a pas fait la preuve de capacités professionnelles suffisantes, son contrat est reconduit une fois, pour une durée égale, au maximum, à la durée initiale ;
  • si les aptitudes professionnelles de l'agent sont jugées insuffisantes pour permettre sa titularisation, son contrat n'est pas renouvelé. Il est licencié et peut bénéficier des allocations chômage.  

Des conditions d'emploi équivalentes aux autres agents de la fonction publique mais des aménagements tout au long de la carrière

Quel que soit leur mode de recrutement, les agents handicapés ont les mêmes droits (de grève, syndical, congés...) et obligations (devoir de réserve, obligations de servir...) que les autres agents de la fonction publique. En outre, afin de garantir l'intégration et le maintien dans l'emploi, les agents handicapés qui relèvent d'une des catégories bénéficiaires de la suppression ou du recul des limites d'âge supérieures pour se présenter aux concours peuvent à leur demande, bénéficier de dérogations en termes de carrière.  

Ainsi, comme il a été dit plus haut, elles pourront, afin d'être maintenues dans leur emploi, solliciter et bénéficier : d'un aménagement de leur poste de travail ou d'horaires, d'une formation adaptée, d'une priorité en matière de mutation, de détachement ou de mise à disposition, de départ à la retraite anticipée (entre 55 et 59 ans et sous conditions) ou encore d'un temps partiel de droit, après avis du médecin agréé sans avoir, contrairement aux autres non titulaires, à justifier d'un an d'ancienneté.  

Bien sûr, la mise en oeuvre de ces demandes doit se faire au cas par cas afin d'optimiser l'intégration du fonctionnaire handicapé et le statut dit que ces mesures ne doivent pas conduire à :

  • faire supporter à l'employeur des charges disproportionnées même si, dans ce cas, il convient de noter que l'administration peut bénéficier d'aides par l'intermédiaire notamment du FIPHFP ;
  • à nuire au bon fonctionnement du service et à ses nécessités (article 6 sexies).  

Si depuis la loi n° 2005-102 du 11 février 2005, le législateur milite pour que chacun, quelle que soit sa différence, puisse trouver, au milieu des tous, sa place dans la fonction publique, force est de constater que 5 ans après son adoption, le taux de chômage des travailleurs handicapés avoisine les 20 % (soit près du double du taux national) et que « le taux d'emploi dans la fonction publique (concernant cette population d'actifs) était de 4,4 % au 1er janvier 2008 » (site du Ministère du Travail).  

Pour remplir leurs missions les employeurs publics doivent donc s'engager et s'attacher à mettre en place des méthodes pédagogiques, des organisations innovantes (locaux adaptés...) s'ils veulent répondre à l'obligation d'emploi de 6 % mais aussi généraliser la qualité de l'accueil des personnes handicapées recrutées. Ce n'est qu'au prix de cet effort que les mesures prises par le législateur en faveur de l'inclusion des personnes handicapées dans la FP pourront être, au quotidien, citées en exemple. 

Sandrine BOTTEAU  

Les personnes handicapées peuvent bénéficier de deux voies d'accès à la fonction publique : le concours et le contrat.

Les candidats handicapés peuvent bénéficier, sous conditions, d'une suppression ou d'un recul des limites d'âge pour se présenter aux concours ou encore d'aménagement des épreuves.

POUR ALLER PLUS LOIN

Pour toute demande d'information, il convient de se rapprocher de :

  • la Maison départementale des personnes handicapées
  • voir aussi la fiche «le recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique» (fiche pratique) http://www.fonction-publique.gouv.fr/article637.html  

Liens internet pour consulter les offres d'emploi :

  • de la fonction publique de l'État: www.biep.gouv.fr

Bourse interministérielle de l'emploi publique

  • de la fonction publique territoriale:

www.cnfpt.fr www.fncdg.com de la fonction publique hospitalière: www.aphp.fr www.fhf.fr

Références

Loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires

Loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État : Articles à consulter : 27, 37 bis, 40 ter, 60, 62

Décret n° 95-979 du 25 août 1995 relatif au recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique pris pour l'application de l'article 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État

Loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : Articles à consulter : 35, 38, 54, 60 bis, 60 quinquiès

Décret n° 96-1087 du 10 décembre 1996 relatif au recrutement des travailleurs handicapés dans la fonction publique pris pour l'application de l'article 38 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale

Loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : Articles à consulter : 27, 38, 46-1, 47-2

Décret n° 97-185 du 25 février 1997 relatif à certaines modalités de recrutement des handicapés dans la fonction publique hospitalière

 

[1] Loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées 

[2] Fonds pour l'Insertion des Personnes Handicapées dans la Fonction Publique : quand le taux d'emploi est inférieur au taux légal de 6 %, un nombre d'unités manquantes est alors calculé. Ce nombre peut toutefois être réduit d'un nombre d'unités déductibles déterminé par le montant de certaines dépenses prévues par le code du travail. Si la somme de ces déductions ne permet toujours pas à l'employeur d'atteindre le taux de légal de 6 %, il doit s'acquitter de la contribution au FIPHFP. Ce calcul est fonction du nombre d'unités manquantes et de la taille de l'employeur.

[3] La commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) remplace la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) et la commission départementale de l'éducation spéciale (CDES) compétente pour reconnaître les travailleurs handicapés. Ses attributions sont définies à l'article L 241-6 du code de l'action sociale et des familles.

[4] Emploi permanent, déclaration de vacance, publicité 

[5] École supérieure de l'éducation nationale 

[1] Loi n°2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées 

[2] Fonds pour l'Insertion des Personnes Handicapées dans la Fonction Publique : quand le taux d'emploi est inférieur au taux légal de 6 %, un nombre d'unités manquantes est alors calculé. Ce nombre peut toutefois être réduit d'un nombre d'unités déductibles déterminé par le montant de certaines dépenses prévues par le code du travail. Si la somme de ces déductions ne permet toujours pas à l'employeur d'atteindre le taux de légal de 6 %, il doit s'acquitter de la contribution au FIPHFP. Ce calcul est fonction du nombre d'unités manquantes et de la taille de l'employeur.

[3] La commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) remplace la commission technique d'orientation et de reclassement professionnel (COTOREP) et la commission départementale de l'éducation spéciale (CDES) compétente pour reconnaître les travailleurs handicapés. Ses attributions sont définies à l'article L 241-6 du code de l'action sociale et des familles.

[4] Emploi permanent, déclaration de vacance, publicité 

[5] École supérieure de l'éducation nationale 

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